Il y a quelques vies, j’étais directrice commerciale dans l’industrie du luxe. Je travaillais pour une filiale de Procter et Gamble, distributeur de parfums et de produits de beauté de luxe. Je vivais à Miami, j’étais jeune, belle, je vivais la high life (rires). J’ai travaillé plusieurs années dans cette industrie à plusieurs postes, mais mon aventure de commerciale a été très brève et c’est avec elle que mon expérience dans cette société s’est terminée.
Avant d’être directrice commerciale dans cette même société, j’étais l’une des directrices de formation Amérique Latine & Caraïbes. Je ne m’étais jamais autant éclaté, je n’avais jamais autant voyagé. Je m’étais trouvé une passion dans la formation, j’avais 24 ans et la vie ne m’était jamais parue aussi belle.
Cependant…cependant…dans cette société, le graal (du moins à mes yeux), c’était le poste de direction commerciale. Il me semblait à l’époque, que cette position, ce statut était plus valorisé, et à mes yeux c’est là où je devais aller. Dès que j’en ai eu la possibilité, j’ai donc postulé dès qu’un poste s’est libéré et j’ai été prise. Là a commencé ma descente dans les abimes professionnels. Ce poste que j’avais insisté pour avoir, je ne m’étais pas rendu compte du niveau de responsabilité requis, ni du stress qu’il y’avait derrière.
Je t’explique : En tant que formatrice, ma responsabilité était de former. Je le faisais très bien, mais une fois la formation terminée, je pouvais profiter de mes voyages, visiter l’île ou le pays dans lequel je me trouvais sur le moment, au frais de la reine bien sûr.
En tant que commerciale, j’étais devenue responsable des chiffres provenant des points de vente dont dans ma zone géographique. Tout à coup, j’avais un objectif financier à atteindre. Mon premier objectif, plus d’1 million dollars US en une année. Dans la fougue de la jeunesse, je pensais que je pouvais le faire, sincèrement. J’ai abordé cela comme j’abordais tous les défis de ma vie, avec excitation et joie. Bien sûr que je pouvais le faire !
L’euphorie n’a pas duré longtemps. Je me suis rendu compte, que demander de l’argent ne me venait pas aussi naturellement que les autres aptitudes que j’avais apprises sur le tas. Je n’aimais pas mettre la pression sur mes responsables de vente, j’étais totalement empathique à toutes leurs histoires à faire pleurer dans les chaumières, aux difficultés qu’ils avaient pour faire leurs chiffres. J’ai commencé à aller au travail à reculons, la boule au ventre. Mon expérience dans la « corporate america » était presque devenu un supplice, je n’aimais plus mon travail.
Ce qui devenait arriver arriva. Au bout de plusieurs conseils et avertissements de mes patrons, je me suis fait virer. Je n’avais pas réussi à faire mon chiffre, good bye. Je me suis retrouvée, comme dans les films, avec un carton contenant toutes mes affaires dans les bras, les larmes aux yeux, à la porte.
Avec le recul, je me rends compte que les leçons que j’ai tirées de cette expérience ont créée en moi des croyances limitantes, des peurs avec et sur lesquelles j’ai construit les expériences professionnelles qui sont venues après.
Je me souviens toujours de ma patronne à l’époque qui m’avait dit « Nice does not cut it ». Comme on dirait au Cameroun, « on ne mange pas ça ». Le message : range ton empathie au placard, ce n’est pas ça qui fait les ventes. Tu as besoin d’être plus agressive, de pousser plus.
Deuxième croyance limitante avec laquelle je suis sortie de là et dont je commence tout juste à me défaire : Je ne suis pas une vendeuse, je ne sais rien vendre, plus jamais je ne prendrais un poste pareil, j’ai bien appris ma leçon. Je ne sais pas vendre.
Après cette expérience, j’ai obtenu mon master et je me suis mise à mon propre compte, j’étais devenu consultante mode, j’avais décidé de travailler avec les créateurs de mode Africaine pour développer leurs entreprises à l’international. J’ai commencé en 2007. L’aventure a duré sept ans. De belles années, mais des années difficiles également. J’ai frôlé des grands noms de la mode africaine, organisé des défilés de mode, assisté à des fashion week. J’avais cette sensation d’être dans le juste, le vrai, j'accomplissais ma mission, ce pourquoi j'étais faite. Je me suis démenée, malmenée pour que mon travail aboutisse. Les deux premières années, tout s’est bien passé. De Miami, j’ai assisté à des salons professionnels, j’ai placé des vêtements de clients en boutique.
En revanche, les cinq dernières années furent un cauchemar financier. Je me suis endettée (dette que je continue de payer jusqu’aujourd’hui où j’écris ces lignes – je fini les paiements à la banque cette année - yay !). Je me suis associée, pensant que c’était cela la solution, et j’ai laissé la direction financière à mon amie de l’époque (je ne sais pas vendre, comprends-tu), ce qui m’a couté encore plus de dettes (envers elle) plus une amitié. Cette expérience est celle qui m’a mené aux portes de la dépression.
Je me suis dit que décidément, la gestion de l’argent et moi ne faisions pas bon ménage et que désormais, je ne m’engagerai plus dans des aventures me demandant autant d’investissements financiers. Cette deuxième activité avait fini par sceller les conclusions de la première, me confirmant que oui effectivement, je ne sais pas gagner d’argent. Je me suis renfermée sur moi-même, j’ai fermé tous mes comptes sur les réseaux sociaux du jours au lendemain, abandonnant ainsi des milliers de followers et d’amis. Du jour au lendemain, j’ai arrêté de répondre aux coups de fil de ma famille, de mes amis. Je n’ai littéralement parlé à personne d’autre que mon mari, mes enfants et mes voisins en Tunisie pendant deux ans. Je me suis laissée aller physiquement, j’ai pris 20 kilos.
Pendant cette période dépressive, malgré mon mal être intérieur, je n’étais pas professionnellement inactive (rester à la maison sans travail ne me ressemble pas du tout).
Etrangement, mon aventure entrepreneuriale suivante fut plus douce au niveau financier. J’avais renoncé à poursuivre mes rêves, j’avais lâché mes grandes idées. J’étais toujours à mon propre compte, gagnant ma vie comme traductrice-interprète. Pour cette activité, je ne faisais pas de plans sur la comète, aucune intention de conquérir le monde…et pourtant…et pourtant, à l’insu de mon plein gré, je gagnais ma vie confortablement, presque sans efforts. J’avais réussi à me bâtir une bonne réputation dans ce marché, et je n’avais pas besoin de faire quelque démarchage que ce soit, les clients venaient à moi sans que je fasse d’efforts spéciaux. Avais-je réussi à (me) vendre au final ? A l’époque je n’y pensais même pas.
Bref. Pourquoi je te raconte tout cela ?
Eh bien parce que je suis de nouveau à mon propre compte ! je reprends l’aventure de l’entreprenariat, alors que j’avais juré il y a quelques années qu’on ne m’y reprendrait plus.
Ah la vie ! Bon cette fois-ci, je me dis que ça va mieux se passer, que ça va être différent, que je suis plus mûre, je me connais un peu mieux, j’ai plus d’outils à ma disposition, n’est-ce pas ?
Cette fois ci, comme lorsque j’étais traductrice-interprète, la magie va opérer, n’est-ce-pas ?
La suite de mes aventures commerciales, et comment je compte gagner de l'argent dans ma nouvelle aventure au prochain épisode qui ne va pas tarder, c’est promis.