Quand je serai grande.
Quand je serai grande, je voudrais être comme Hugo. Comme Hugo, mon fils qui m’a demandé l’autre jour : « maman, on ne pourrait pas louer un stade et inviter nos amis pour venir nous voir jouer notre pièce, Noam et moi ? » Euh…comment vous dire ? J’ai souri. Je lui ai dit « non mon fils, ce serait trop cher de louer un stade, et peut-être faudrait-il travailler un peu plus votre pièce, non ? »
Comme les enfants de leur âge, Noam et Hugo avaient créé un énième spectacle, et apparemment, leur papa et moi étions de bien piètres spectateurs. La scène me fait encore sourire, bien des jours après.
Lorsque je me suis retrouvée toute seule, je me suis surprise à envier mon fils. Et plus la sortie de Kinlam et les animaux de la forêt avançait, plus je l’enviais. J’enviais sa confiance en lui-même. J’enviais le fait qu’il ne remette pas en question son talent, la fidélité de ses relations (qui viendront toutes bien sûr, remplir un stade pour lui). Il n’y a aucune ironie dans mes propos. Ne voudriez-vous pas vous-même avancer ainsi dans la vie ? Moi, si. Ne pas se poser (trop) de questions. Se fixer un cap, et avancer, sans douter de rien, ni de ses moyens financiers, ni de ses capacités, ni du fait que l’objectif désiré sera atteint. C’est à ce moment-là que j’ai vraiment ressenti l’expression « avoir une âme d’enfant ». Je l’ai ressentie au plus profond de moi, et j’ai compris que c’est dans cet état d’esprit qu’il fallait que j’avance dans ma vie en général, et dans mes activités en particulier.
Cette anecdote m’a fait comprendre deux choses.
La première c’est le nombre de barrières que l’on se met lorsqu’on met un projet en marche. Je suis très fière d’avoir réussi à publier Kinlam et les animaux de la forêt, mais Dieu sait les doutes qui m’ont assaillie à chaque étape du processus. Une fois que la décision fut prise, que le manuscrit ne serait pas uniquement destiné à nos tiroirs, combien de fois me suis-je demandé combien tout cela allait me coûter, si c’était vraiment nécessaire d’aller aussi loin, si j’étais vraiment une écrivaine, genre si mon style d’écriture faisait vraiment professionnel…Et la question que tous les auteurs se posent, comment le livre allait être accueilli. Heureusement que mon ami Éric était là pour me rappeler à l’ordre, parce que cette histoire a bien failli se trouver enterrée quelque part dans les internet. Vous pensez bien que les enfants n’avaient aucun doute, eux. Je leur ai dit que l’on allait publier le livre, et ils l’ont accepté comme une évidence, sans me poser plus de questions. Ils ne m’ont pas demandé si nous avions les moyens de le faire, ni si j’étais sûre que je savais vraiment écrire. La confiance qu’ils portent jusqu’à présent à mes capacités de porter leur livre au plus haut est une des leçons que j’ai apprises tout le long de ce processus.
Lorsque j’ai ramené les premiers exemplaires à la maison, Hugo m’a demandé « donc on va devenir riches et célèbres, maman ? » …Bref, j’adore mon fils.
La deuxième chose que j’ai apprise c’est que, quoi que ce soit que je décide d’accomplir, il me faudrait garder mon âme d’enfant. Il faudrait que je demande à Hugo sa recette, tiens ! Comment acquérir et garder cet état d’esprit ? Comment retrouver mon âme d’enfant ? Lorsque j’observe les miens, je remarque que leurs activités sont uniquement basées sur ce qui les mets en joie et sur ce et ceux qu’ils aiment. Ils décident de ce qu’ils vont faire sur la base des amis qu’ils vont rencontrer, des jeux qu’ils apprécient le plus, et autres. Leurs sentiments, leurs ressentis, leurs envies sont les premiers moteurs des choix qu’ils font pour eux-mêmes. Bah oui, faire leurs devoirs ou aller jouer, pour eux, la question ne se pose même pas ! Le sens du devoir n’existe pas pour eux. Ils ne doivent rien faire, ils ne doivent rien à personne, et ne sont fidèles qu’à leurs désirs, et ceux si sont basés sur ce et ceux qu’ils aiment. Pour eux, c’est aussi simple. Leurs choix sont basés sur la joie et l’amour, jamais sur le devoir et les obligations. Le sens des responsabilités leur est enseigné et au fur et à mesure, cette variable se mets à rentrer dans leurs décisions.
Lorsqu’un enfant aime un instrument de musique par exemple, il va vouloir en jouer, sans se poser de questions sur le prix de l’instrument, sans se poser de questions sur sa capacité à y jouer. Il va choisir, au feeling comme on dit, parce qu’il sait au fond de lui, qu’il saura y jouer. Il aime l’instrument, il en apprécie le son, pourquoi ne saurait-il pas y jouer ? Ce sont ses parents qui vont le diriger vers un autre instrument, sur la base du prix, des aptitudes et du prestige…et s’étonner après que leur enfant n’y arrive pas.
Je me suis donc rendu compte que pour garder mon âme d’enfant, il fallait que je trouve ce qui me mets en joie, et que je m’atèle à ne faire que ça. Sérieusement ? dans le monde d’aujourd’hui, cela semble être un vœux pieu. J’y travaille toujours. Les blessures et les peurs ancrées en moi, en nous depuis le plus jeune âge sont autant de blocages que nous devons dépasser pour nous retrouver, retrouver notre enfant intérieur. Les « et si... » n’ont pas encore quitté mon vocabulaire. Mais j’y travaille, j’y travaille, et Kinlam et les animaux de la forêt en est la première étape.
Quand je serai grande, je voudrai être comme Hugo (en attendant, je vais me renseigner et voir combien ça coûte, la location d’un stade. Peut-être que j’aurai une bonne surprise).
A travers Kinlam et les animaux de la forêt, je vous souhaite de (re)trouver votre âme d’enfant, et de la garder. Et si c’était cela, la recette pour avoir la vie que l’on désire ?